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dimanche, 27 mars 2016 15:34

Aux sources de la philosophie avec George G.M. James Spécial

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Le livre de George G.M. James, publié pour la première fois aux Etats-Unis en 1954, a été traduit en français sous le titre "L'Héritage Volé" (éditions Afrocentricity International, 2015). Dans cet ouvrage, l'auteur guyanais, professeur de latin et de grec à Pine Bluff (Arkansas), joue les détectives de l'histoire. Il mène une véritable enquête pour retrouver les origines de la philosophie. Aux sources de celle-ci, il y a Ta Meri (1), Kemet (2), l'Afrique en quelque sorte. Pour James, c'est clair, les Grecs ont usurpé la philosophie égyptienne. Il y a quelque chose de vraiment paradoxal. Pour l'homme de la rue, la philosophie est d'origine grecque. Or, quand on se penche sur l'histoire de celle-ci, on constate que la Grèce n'a pas accueilli cette philosophie avec tout l'honneur qui lui était dû. Socrate (470-399 avant notre ère) a été jugé et mis à mort par les autorités athéniennes. L'un de ses disciples les plus éminents Platon, fut obligé de s'exiler. Que reprochait-on à Socrate ? C'était le fait d'avoir introduit à Athènes des idées étrangères. En effet, "sa théorie fondée sur la connaissance de soi, "Connais-toi toi-même", est une copie conforme des inscriptions qui étaient inscrites à l'extérieur des temples égyptiens. Ses doctrines de l'immortalité, de la purification de l'âme et du Souverain Bien constituaient un condensé de la théorie de la Purification telle qu'elle était enseignée dans le cadre des Mystères. Socrate lui-même l'a expliqué. Le but de la philosophie était de sauver les âmes par un processus de purification qui élevait l'homme au dessus de sa condition de simple mortel, pour finalement le faire accéder à l'immortalité. C'était l'accomplissement, c'était le Sumum Bonum ou Souverain Bien." (L'Héritage Volé, traduction Etombè et Iterou Ogowè). Malheureusement pour Socrate et les siens, le gouvernement athénien va le condamner à mort pour avoir introduit dans la cité des idées étrangères. Et c'est là qu'on peut se souvenir des mots de Cheikh Anta Diop : "La Grèce était réfractaire à la science avant son contact avec l'Egypte." Réfractaire à la science... Et à la philosophie ? En fait, cette distinction que l'on fait aujourd'hui entre la philosophie et la science , n'avait aucun sens durant l'antiquité. Le Kamit (égyptien) Imhotep (2700 avant J-C) était philosophe, médecin et architecte. A cette époque la Grèce n'existait pas encore en tant que nation constituée. Thalès (625-547), le Grec était philosophe et mathématicien. C'était aussi le cas de Pythagore (580-495 avant J-C). Thalès a étudié en Egypte (Ta Meri), idem pour Pythagore. Ce dernier a passé vingt-deux ans en Afrique selon son biographe Jamblique, pour obtenir une formation digne de ce nom. Ce que l'on sait moins, c'est que Platon et Socrate ont aussi étudié à Ta Meri (Egypte). Ces informations, nous les avons par les ouvrages de Diop, d'Omotunde, ainsi que par les traductions des auteurs de l'antiquité. Qu'est-ce que ce livre "L'Héritage Volé", apporte de nouveau ? Le livre de James nous fait comprendre le processus qui nous permet d'affirmer aujourd'hui que oui, les Grecs ont bien volé la philosophie kémite (égyptienne). Les protagonistes de cette affaire sont Alexandre le Grand, qui envahit Ta Meri en 332 avant notre ère, Aristote qui à cette occasion, mit la main sur un nombre très important de livres scientifiques, les empereurs romains Théodose et Justinien, qui proclamèrent le christianisme comme religion officielle et firent fermer les temples Kemits où avaient lieu les Mystères Egyptiens. Dès lors les Mystères des Africains vont être marginalisés et le Christianisme va s'installer durablement comme Religion à vocation universelle. Notons que le mot "catholique" du grec "katholikos", signifie justement universel. C'est l'école d'Aristote qui mettra la main sur la philosophie des Kemits. Théophile Obenga, helléniste émérite, nous dit que le dictionnaire étymologique du grec, Chantraine, présente le mot "sophia" comme étant d'origine inconnue. Pour Molefi Kete Asante, "le mot philosophie tel qui nous parvient par l'intermédiaire du grec, comporte deux parties "philo" qui signifie frère ou amoureux et "sophia" qui veut dire "sagesse" et "le sage". Ainsi un philosophe, est en fait appelé "un amoureux de la sagesse". Ce mot "Sophia" provient d'une langue africaine, les Mdw Ntr, la langue de l'Ancienne Egypte où le mot "seba" signifiant "le sage" apparaît pour la première fois en 2052 avant J-C, dans la tombe d'Antef I, bien avant l'existence de la Grèce et du peuple grec. Ce mot évolua en "Sebo" en copte et en "Sophia" dans la langue grecque. De la même façon que le Philosophe signifie étymologiquement "l'amoureux de la sagesse". "Seba" signifie le Sage, dans les écrits figurants dans les anciennes tombes des Egyptiens." (L'origine africaine de la philosophie, mythe ou réalité ?", (dyabukam.com). Mais revenons au livre de George G.M. James, "L'Héritage volé". James retrace le chemin suivi par la philosophie. Avant les Grecs athéniens, les Ioniens et les Italiens ont été en contact avec cette philosophie, mais il ne leur serait jamais venu à l'idée de s'attribuer ces connaissances. Mais quelle est la doctrine qui serait la mère africaine de cette philosophie grecque ? Il s'agit, selon James, de la Théologie Memphite : "La Théologie Memphite est une inscription sur un pierre qui se trouve à présent au British Museum. Elle contient à la fois la théologie, la cosmologie et les conceptions philosophiques des Kemits. J'y ai fait déjà référence dans mon étude sur les doctrines de Platon : mais cela doit être encore répété ici, afin de souligner son importance prépondérante en tant que base de toute la philosophie grecque. Elle est datée de 700 avant J-C et porte le nom d'un pharaon égyptien qui affirma avoir copié une inscription de ses ancêtres. Cette affirmation peut être vérifiée par la langue et la composition du texte qui sont tout à fait caractéristiques du style des Kemits d'une certaine époque. Ainsi la date originale de la théologie memphite est fixée à une période très ancienne de l'histoire égyptienne. Il s'agit de l'époque durant laquelle les premières dynasties décidèrent d'établir leur première capitale à Memphis, la cité du dieu Ptah et là, nous sommes en 4000 et 3500 avant J-C (Henri Frankfort, Intellectual Adventure of Ancient Man, p. 55), (L'Héritage volé, page 189). "De l'eau provient toute chose" est notamment l'un des postulats des philosophes présocratiques. Justement, dans la théologie memphite, égyptienne, kemite, africaine, on nous dit qu'à l'origine, il y a le Noun, une étendue d'eau. C'est de là que proviennent les entités divines. Râ lui-même provient du Noun. Informés sur les recherches métaphysiques de nos ancêtres, que devons-nous faire aujourd'hui ? La question est pertinente parce que pour James, sans ce vol de la philosophie kemite (les Mystères Egyptiens) le continent africain aurait aujourd'hui, une toute autre réputation. Parce que c'est à cause de ce vol, que le continent africain est aujourd'hui présenté comme un continent arriéré qui n'aurait apporté aucune contribution à la civilisation. Ainsi pour George G.M. James, par une éducation véritable, il s'agit de faire en sorte que les uns, (les Blancs) se débarrassent de leur complexe de supériorité. Simultanément les autres (les Noirs), doivent s'affranchir de leur complexe d'infériorité. L'auteur appelle ainsi de ses voeux une Nouvelle Philosophie Africaine de la Rédemption. Comme Cheikh Anta Diop, George G.M. James apparaît comme un véritable précurseur de l'Afrocentricité, notre mouvement intellectuel d'émancipation qui vit le jour en 1980, avec le livre "Afrocentricity, the Theory of Social Change", de Molefi Kete Asante.* Iterou Ogowè "L'Héritage volé" est disponible chez Soul Brother, à Paris, métro Châtelet Les Halles, 4 rue des prêcheurs, 75001 Paris. Prix 25 euros. Ce livre est aussi en vente dans les événements organisés par de nombreuses sections d'Afrocentricity International à travers le monde. 1. Ta Meri, littéralement "le Pays bien-aimé" en cikam. Il s'agit de l'espace géographique que l'on désigne aujourd'hui sous le nom d'Egypte. 2. Kemet, la noire, c'est à dire Ta Meri - le pays bien-aimé + Ta Seti - La terre de l'Arc + Ta Neter, La terre du démiurge. *"L'Afrocentricité", dans sa version française traduite de l'anglais par Ama Mazama, est éditée par Afrocentricity International (2014).
Lu 19077 fois Dernière modification le dimanche, 27 mars 2016 22:40

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